Peintre, graveur, illustrateur et écrivain d’origine suisse naturalisé français, Félix Vallotton (1865-1925) est l’un des artistes les plus singuliers de la fin du XIXe et du début du XXe siècle. Membre du groupe des Nabis, son œuvre conjugue rigueur du dessin, ironie mordante et compositions audacieuses. Que vaut aujourd’hui une œuvre de Vallotton ? Dessin, peinture ou xylographie : chaque support possède sa propre cote. Ce guide vous livre les clés pour comprendre la valeur des œuvres de Félix Vallotton et faire estimer la vôtre en toute confiance.
Cote, valeur et estimation des œuvres de Félix Vallotton (1865-1925)
Le marché de l’art accorde depuis plusieurs décennies une attention croissante à l’œuvre de Félix Vallotton. Si ses peintures de nus ou d’intérieurs bourgeois sont les plus emblématiques, ses dessins et ses bois gravés figurent également parmi les plus recherchés. Mais quelle est réellement la valeur d’une œuvre de Vallotton ? Tout dépend du support, de la période, du sujet traité et de l’état de conservation. Ce guide vous propose une analyse détaillée pour chaque type d’œuvre.
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Les peintures de Félix Vallotton : œuvres les plus valorisées
Les peintures de Vallotton sont parmi les plus cotées sur le marché. Il s’agit principalement de nus féminins, de paysages stylisés, de portraits et de scènes d’intérieur.
- Nus féminins (huile sur toile) : souvent entre 200 000 € et 1 200 000 € selon la période et la provenance.
- Scènes d’intérieur : entre 150 000 € et 800 000 €, les œuvres des années 1890-1910 étant particulièrement recherchées.
- Paysages synthétiques (souvent peints après 1900) : estimés entre 80 000 € et 400 000 €.
- Portraits : selon le modèle, de 60 000 € à 300 000 €.
Les œuvres datées de la période Nabi (années 1890) sont très demandées, en particulier celles qui révèlent une influence japonaise et une stylisation marquée.
Les dessins de Vallotton : un marché actif
Excellent dessinateur, Félix Vallotton a produit un nombre important de dessins à la plume, au crayon ou à l’encre. Ils sont très appréciés pour leur précision, leur ironie et leur caractère narratif.
- Dessins à l’encre ou au crayon : entre 4 000 € et 25 000 €, selon la taille, le sujet et la provenance.
- Feuilles préparatoires pour ses gravures : autour de 5 000 € à 15 000 €.
Les feuilles signées, bien conservées et datées des années 1890-1900 attirent souvent les collectionneurs et peuvent faire l’objet d’enchères soutenues.
Les gravures sur bois : des œuvres emblématiques de Vallotton
Félix Vallotton est l’un des plus brillants représentants de la renaissance de la gravure sur bois à la fin du XIXe siècle. Ses célèbres « Intimités » ou ses images de presse constituent aujourd’hui des pièces emblématiques.
- Gravures tirées à peu d’exemplaires (avant 1900) : entre 8 000 € et 40 000 € selon la rareté du tirage.
- Séries complètes (comme « Intimités » ou « C’est la guerre ! ») : jusqu’à 70 000 € pour un ensemble complet en bon état.
- Gravures isolées : estimées entre 3 000 € et 15 000 € selon le sujet et l’état.
La qualité du papier, la fraîcheur de l’encrage et l’existence d’un tirage original influencent fortement la valeur de ces estampes.
Autres supports : illustrations, livres et œuvres mineures
Vallotton a également illustré de nombreux ouvrages, notamment pour Octave Mirbeau ou Paul Verlaine. Ces publications peuvent avoir de la valeur, surtout si elles sont signées ou tirées à petit nombre.
- Livre illustré signé ou en tirage de tête : entre 2 000 € et 10 000 € selon la rareté.
- Illustrations originales (hors gravure) : entre 5 000 € et 12 000 €.
Les œuvres de Vallotton restent très prisées des collectionneurs de la Belle Époque, de l’estampe et de l’art symboliste ou nabi.
Tableau récapitulatif des prix des œuvres de Félix Vallotton
| Type d’œuvre | Fourchette de prix estimative | Observations |
|---|---|---|
| Peinture (nus, intérieurs, paysages) | 80 000 € à 1 200 000 € | Les nus et intérieurs sont les plus cotés |
| Dessin à l’encre ou au crayon | 4 000 € à 25 000 € | Intérêt marqué pour les dessins datés et signés |
| Gravure sur bois | 3 000 € à 40 000 € | Plus haute valeur pour les tirages précoces |
| Livre illustré ou illustration originale | 2 000 € à 12 000 € | Signatures et tirages de tête valorisés |
Félix Vallotton (1865-1925) : un parcours entre radicalité esthétique et satire sociale
Une formation académique au cœur de Paris
Félix Vallotton naît le 28 décembre 1865 à Lausanne, en Suisse, dans une famille bourgeoise. Dès 1882, il s’installe à Paris où il suit les cours de l’Académie Julian. Il y côtoie des artistes comme Edouard Vuillard, Pierre Bonnard ou Maurice Denis, avec qui il partagera plus tard l’aventure Nabi.
Très tôt, Vallotton manifeste une rigueur graphique peu commune. D’abord influencé par Ingres et la peinture académique, il s’en éloigne progressivement pour adopter une esthétique plus austère, nourrie d’observation et de critique sociale. Il commence par exposer des portraits au Salon, mais c’est par la gravure qu’il se distingue véritablement dans les années 1890.
La révolution du bois gravé
Dans les années 1891-1895, Félix Vallotton bouleverse l’art de la gravure sur bois, qu’il modernise radicalement. Influencé par les estampes japonaises (ukiyo-e), il invente un langage graphique personnel, à base de noirs profonds, de silhouettes découpées et d’aplats contrastés. Il signe de nombreuses planches pour la presse illustrée (notamment La Revue blanche et Le Cri de Paris), devenant un redoutable chroniqueur de son temps.
Ses gravures sont mordantes, ironiques, parfois cyniques. La série des Intimités, par exemple, dresse un portrait grinçant de la bourgeoisie, des relations conjugales ou du désir. Cette radicalité dans la forme comme dans le propos lui assure une reconnaissance rapide dans les cercles intellectuels et avant-gardistes.
Le tournant Nabi et l’exploration picturale
En 1892, Vallotton rejoint les Nabis, groupe de jeunes artistes influencés par Gauguin et les arts décoratifs. Son art évolue vers une peinture plus synthétique, aux formes épurées et aux compositions symbolistes. Mais contrairement à ses camarades, Vallotton conserve une distance, une ironie froide qui le distingue des autres Nabis.
Il s’intéresse aussi à la scène domestique et à l’intériorité. Ses intérieurs de bourgeoisie deviennent un thème central : ambiance feutrée, tension psychologique, perspective aplatie. Il peint aussi des nus féminins, souvent allongés sur des draps blancs, traités avec une froideur quasi clinique qui déconcerte ses contemporains.
Première Guerre mondiale et renouveau stylistique
Durant la Grande Guerre, Vallotton, bien que trop âgé pour combattre, met son art au service de la cause française. Il réalise des gravures engagées, notamment la série C’est la guerre !, où il dénonce la violence des combats avec force et sobriété.
À partir de 1918, son style évolue vers une peinture plus ample, plus lumineuse. Il multiplie les paysages méditerranéens, les vues de Bretagne ou les compositions de natures mortes. L’influence de Cézanne se fait sentir, tout comme un désir de monumentalité.
Une œuvre littéraire et critique
Vallotton ne fut pas seulement un artiste visuel. Il écrivit aussi des romans, des essais, des critiques d’art et tint un journal. Ce goût pour la littérature traduit une sensibilité intellectuelle, un besoin de réflexion sur l’acte de création et la société de son temps. Son roman La Vie meurtrière, publié à titre posthume, offre un autoportrait troublant de l’artiste.
Fin de vie et postérité
Félix Vallotton meurt le 29 décembre 1925 à Paris. Bien que reconnu de son vivant, notamment par ses expositions au Salon d’Automne ou à la galerie Druet, il ne connut pas de réelle consécration muséale avant la seconde moitié du XXe siècle. Aujourd’hui, son œuvre est réévaluée et saluée pour son audace graphique, sa modernité et son regard critique sur la société de son temps.
Ses œuvres figurent dans les plus grandes collections publiques, en Europe comme aux États-Unis. L’ensemble de son travail – gravure, peinture, dessin, illustration – offre un regard rare et sans concession sur les tensions de la modernité naissante.
